Dévoile-nous ton histoire.

NOVEMBRE 2012
Il y a dix ans, nous étions en filature mon partenaire espion et moi-même sur un important trafiquant d’héroïne en visite « de courtoisie » auprès de ses principaux fournisseurs à New York. Nous étions sur le point de connaître notre heure de gloire, il nous suffisait de le suivre jusque sa planque et de l'arrêter sur place pour l’interroger et obtenir de lui des renseignements à offrir sur son trafique à nos supérieurs. Cela faisait plus de trois mois que nous le traquions, et nous nous délections à l’intérieur du véhicule qui suivait celui du trafiquant, d'une gloire personnelle bientôt imminente. Mon partenaire sur cette affaire était comme moi membre de la C.I.A. Sa véritable identité m'avait toujours été inconnue pour des raisons professionnels. Nous nous connaissions pourtant depuis bien trois ans sous bien de fausses identités. De la même année que moi, il fut recruté un an après mon ascension au sein de l'agence centrale de renseignements. Je ne suis pas du genre à faire dans les sentiments, mais je dois dire qu'il était un homme que j’appréciai à sa juste valeur, qu'il m'arrivait parfois d'admirer pour son travail efficace et ordonné, et qui a, je ne serais dire pourquoi ni comment, toujours suscité beaucoup d'intérêt pour moi. Au cours de ces trois mois passés ensemble, nous avons formé un duo soudé, très à l'écoute l'un de l'autre, mais cette relation jusqu'alors très professionnelle c'est rapidement transformée en un jeu dangereux. Je suis une fervente séductrice, j'ai l'art et la manière d'utiliser et de manipuler les hommes comme bon me semble, mais ces talents sont toujours utilisés à bon escients pour recueillir – encore et toujours – des informations. Au cours d'une surveillance rapprochée, nous avons passé une semaine en planque en sortant très rarement à l’extérieur de peur de nous faire repérer. Nous avons développé sans le vouloir quelque chose de bien plus fort que nous l'aurions imaginé. Il suffisait qu'il me frôle pour que je sente ma gorge se nouer, qu'il dépose un regard sur moi pour que mon corps se mette à frissonner. Je prenais mon mal en patience pour comprendre ce qui ne tournait pas rond chez moi.

Un soir, je devais passer à l'action et recueillir des informations auprès d'un important informateur au cours d'une conférence sur « La mythologie ancienne » donnée dans un grand muséum de la ville. Cette conférence était réservée à la haute société et il me fallait revêtir une magnifique robe cocktail à cette occasion et me munir d'une invitation pour faire mon entrée. Je n'étais pas surveillée cette fois par mon partenaire, et sans le savoir, nous nous apprêtions à commettre la seule et unique erreur de notre carrière au cours de cette soirée. Alexander m'attendait à l’extérieur, fumant une cigarette collé contre notre véhicule. Nous avions une confiance aveugle envers cette informateur dont la CIA nous avait assuré que nous avions rien à craindre de lui. J'entrais à l’intérieur du musée et rejoignait l'informateur qui m'attendait. « Je devine que vous êtes cet agent dont on m'a si longuement parlé ? » un vieil homme au teint pâle me faisait face, habillé d'un costard presque trop grand pour lui. Il prit ma main pour l'embrasser, je le sentais étrangement nerveux mais je ne m'en inquiétais pas : on me trouvait facilement impressionnante dans mes habits de lumière, étant une femme dotée d'un charisme envoûtant, je savais en jouer sans faire beaucoup d’efforts. Je lui répondait d'un sourire agréable, et il me prit le bras pour m'accompagner à l'écart de la soirée animée et pleine à craquée d'hommes et de femmes blindés de thune, pour nous asseoir sur un canapé devant une magnifique toile dont je ne reconnaissait pas l'auteur. Une serveuse vint nous proposer une coupe de champagne que l'informateur prit soin de choisir pour moi avant de me l'offrir. Avant de venir, Alexander et moi... et il faut que je le signale car je ne tiens plus, avions échangés ensemble un baisé avant de juger cela comme une erreur. En prenant le chemin du musée, nous n'avions eu aucune discussion ensemble. Tandis que je prenais la coupe de champagne entre mes doigts, je songeai à lui et me sentait quelque part, incroyablement bien, et de surcroît, je n'étais plus vraiment attentive aux dangers que j'aurais pu courir en cette soirée. J'avais à l'époque vingt-cinq ans, j'étais encore jeune, et relativement naïve pour mon âge, je prenais donc pour la première fois un très grand risque en perdant un peu de mes qualités d'espionne en profitant de cette soirée qui m'apparaissait peu risquée. « Bien, vous savez pourquoi je suis ici, ne tournons pas plus longtemps autour du pot. » Je ne touchais pour le moment pas à mon verre, et attendait de l'informateur qu'il parle enfin. « Je vois, vous n'êtes pas du genre à être douée de patience... c'est drôle, vous ressemblez beaucoup à votre père... » Je faillit laissé échapper ma coupe de champagne lorsque l'informateur évoqua connaître mon père. Je le regardais sans rien dire, mon sang se figea, et j'attendais qu'il m'en dise plus ; si celui-ci se jouait de moi, j'étais déjà prête à lui mettre le couteau sous la gorge pour l'inciter à ne plus recommencer. « Je comprend que cela vous laisse sans voix. Vous savez, je suis vieux, je ne sais pas combien de temps il me reste à vire sur Terre, vous rencontrer me ravi et je veux absolument me confier à vous au sujet de votre père avant de mourir. Je suis ce que l'on peut appeler, un ancien ami de Richard. Pour vous prouver l’authenticité de mes paroles, je peux vous dire que vous et moi nous nous sommes rencontrés dans le passé. A l'époque, vous viviez dans sa planque en Alabama et vous portiez souvent entre vos bras une peluche que vous nommiez.... Red-Furia. » Je n'ouvrais la bouche que pour montrer mon étonnement : seul mon père connaissait le nom de cette peluche qu'il m'avait offert. Je n'étais pas certaine de pouvoir faire confiance à ce vieux monsieur, mais son discours commençait sérieusement à m'intéresser. Je portais tandis qu'il m'observait, le champagne à mes lèvres pour en boire quelques gorgées. Je fut surprise de constater que quelques gouttes de sueur étaient apparentes sur le crâne chauve de l'intriguant informateur. « J'ai longtemps aidé votre père dans ses affaires douteuses. » « Étrange, il ne m'a pourtant jamais parlé de vous. » « Et c'est la raison pour laquelle je suis ici. Votre père était un escroc, quand ses affaires sont devenues dangereuses pour moi, je l'ai laissé tombé et celui-ci a décidé de faire une croix définitive sur moi. J'ai plus tard cherché à me racheter en participant à l'une de ses escroqueries. Mais votre père a choisi de me trahir pour se venger de mon comportement passé. A cause de lui, j'ai passé dix ans de ma vie en prison. » « Je vous arrête tout de suite, je ne suis pas ici pour vous entendre vous plaindre de mon père. Si vous n'avez rien a m'apprendre, je préfère m'en aller. » « N'êtes vous donc pas curieuse de connaître la vérité, sur la raison de ma visite ? Votre père a volé trois ans de ma vie, vous prendre trente minute de la votre ne devrait pas vous déranger. » « Je n'ai rien avoir avec ses histoires, cela ne me concerne pas. » « Et pourtant vous avez longtemps participé à ses escroqueries avant que la CIA ne s'intéresse à vous alors que vous n'étiez qu'une gamine... ». Ce vieux commençait sérieusement à me mettre hors de moi, le savoir détenir autant d'informations m'énervait au plus au point. Remuer ma vie privée et mon ancienne vie de cette manière me mettait en plus de ça en mauvaise posture, car il semblait être la seule personne au monde sans parler de mes supérieurs, à en savoir autant sur moi. Je m'apprêtais à me lever lorsque je sentais à l’intérieur de ma poitrine une douleur étrange. Une larme coula sur mon visage, le temps sembla soudain s'arrêter. Le vieux exprima un sourire démoniaque et m'observait, souffrante, le verre tomba d'entre mes mains et se brisa devant mes talons. « Que... » J'observais le verre puis le visage du vieil homme qui venait de se relever en rajustant sa cravate. Il prononça ces quelques mots : « Si je ne peux atteindre votre père décédé d'un cancer qui d'ailleurs n'en était pas un, je préfère autant m'occuper de vous. Votre père était un salop ! Je l'ai empoisonné de la même manière que vous vous apprêtez à mourir. Je vous aide en vous retirant la vie, et vous soulagez ma peine, en rejoignant votre père. DIX ANS DE MA VIE DERRIÈRE LES BARREAUX... je ne pourrais jamais l'oublier. » « Je vous tuerai de mes mains !! » dis-je enragée, me relevant avec grande difficulté, manquant de retomber sur le canapé. Il ricana avant de quitter définitivement le musée, me laissant seule : « Vous allez mourir d'un arrêt cardiaque dans les prochaines minutes qui vont suivre, je doute que vous puissiez survivre à ça. Vous saluerez votre père pour moi, Red-Furia ! »




Tandis que nous traversions un pont dans notre véhicule de filature à l'intérieure de la ville de New York Alexander et moi, les véhicules devant-nous s'arrêtèrent en plein milieu de la route. C'est à ce moment-là que la panique générale débuta : Les gens quittaient leurs véhicules et se mettaient à courir dans tout les sens. Ce fut pour moi une confusion très intense, car je voyais aussi les passagers et le trafiquant que nous traquions depuis des mois s'enfuir à toute vitesse à l'autre bout du pont. Ramassant mon arme sur le siège arrière, je m’apprêtais à sortir de mon véhicule sans me poser plus de questions mais avant que je ne pose un pied dehors en ouvrant ma portière, Alexander me hurla de ne pas bouger de mon siège. Je le regardais, rageuse et prête à lui demander pourquoi et à lui faire entendre raison – nous allions perdre le trafiquant si on ne sortait pas maintenant – quand son regard, figé sur place, m'interpella. Son regard se posait sur ma fenêtre, derrière moi tandis que j'étais tournée vers lui. J’eus envie de dire quelque chose, mais dans ses yeux je compris que quelque chose ne tournait pas rond : je lisais la peur sur son visage. Je me retournais, très lentement, de peur que quelqu'un pointe en ce moment même une arme sur nous, quand il m'ordonna de vérifier que ma fenêtre était bien fermée. Quand mes yeux se déposèrent enfin sur l’extérieur, je fut soudain frappée de terreur et à mon tour, je me sentie comme littéralement paralysée. Une vague impressionnante, gigantesque et pour ne pas dire monumentale, s'engouffrait devant nous dans la ville de New York, emportant tout sur son passage. En deux en trois mouvements, Alexander attacha ma ceinture puis la sienne. Je ne savais pas si cette idée était bonne, ou au contraire, très mauvaise, car mon cerveau semblait en pleine ébullition et mon corps ne réagissait plus. Tout indiquait que nous allions mourir, et cette scène signifiait pour moi comme très certainement pour Alexander, une mort imminente. Ma lèvre trembla et je n'osa pas prononcer un mot, je détournais mon regard devant cette vue atroce pour le plonger dans celui de mon partenaire qui était bien plus que cela, le seule homme au monde que j'avais aimé. Il prit ma main et la serra très fort entre ses doigts.... quand la vague vint nous frapper de plein fouet. La voiture fut emportée à l’intérieur de celle-ci et effectua dans l'eau quelques tonneaux, s'écrasant parfois contre les immeubles qui se décomposaient avec le choc intense de la vague. Notre véhicule était un véhicule blindé que nous avait fourni la CIA, par chance, les vitres ne se brisèrent pas tout de suite, mais nous étions baladé sous l'eau et frappé contre un bon nombre de débris, et peut-être-même des corps humains mais je n'avais pas le temps d'y penser tellement nous étions secoués. Nous nous prenions la tête contre le véhicule et nous fûmes bientôt recouverts de blessures. La vague passée continuant sa route à l’intérieur de la ville, le véhicule sombra de plus en plus au fond de l'eau. Je tournais la tête vers Alexander tandis que la voiture commençait à se remplir de plus en plus, ayant trouvée un moyen de se faufiler jusqu'à nous : celui-ci était largement sonné, et semblait ne plus répondre de rien, ses blessures m'apparaissaient beaucoup plus graves que les miennes. Je choisie de le faire sortir de là, au péril de ma vie. Je le détachais et me détachais ensuite, prenait de l'air plein les poumons – nos nombreux entraînements en apnée pouvait peut-être nous sauver la vie – et grâce à l’automatisme de notre voiture haute technologie – qui Dieu merci, fonctionnait toujours par je ne sais quel miracle – ma fenêtre réussi à s'ouvrir et l'eau pénétra entièrement le véhicule. Je sortais Alexander de là, passant à travers la fenêtre tandis qu'il était tombé dans les pommes. J'avais prit autant d'air que possible pour éviter de me noyer. A mi-chemin entre le fond de l'eau et le ciel, je redonnais à Alexander un peu d'air par le biais d'un bouche à bouche forcé et, m'agrippant à la vie avec ferveur, j'utilisais toute ma force pour nous sauver la vie. Quand enfin je réussie à nous faire sortir la tête de l'eau, je reprenais mon souffle en essayant de garder Alexander un maximum le visage en dehors de l'eau en observant les alentours : de nombreux débris nous entouraient, je nageai alors avec grande difficulté – au bord de l'épuisement – jusqu'un grand panneau publicitaire qui flottait sur cet horrible océan pour nous hisser dessus. Une fois sauf, j'effectuais sur Alexander les gestes de premiers secours. Son pouls était faible, et lorsqu'il sortit de son inconscience, il cracha le liquide qui avait tout de même réussi à entrer dans ses poumons avant de se remettre à respirer correctement. Je venais de lui sauver la vie à mon tour, tandis que lui avait sauvée la mienne quelques semaines auparavant lorsque je rencontrais une veille connaissance lors de cette conférence dans ce fameux musée. Il ne prononça pas un mot et épuisée, je tombais dans une fatigue intense et me laissait tomber de tout mon long sur le panneau qui flottait et nous permettait de survivre à la noyade. Je sombrais petit à petit à mon tour dans l'inconscience...